2025
Pourquoi les versets ne doivent pas sortir de leur sens premier ?
Intervenant: Dan Dray
Date: Juillet 2025
Un principe talmudique énonce : “אֵין מִקְרָא יוֹצֵא מִידֵי פְשׁוּטוֹ” : “Un verset ne sort pas de son pshat” (souvent traduit par “son sens littéral”).
Si l’on suit ce principe, on a l’impression d’une impossibilité totale d’interprétation : Le verset dit ce qu’il dit, et on ne doit pas le sortir de sa littéralité. Or, le Talmud entier regorge d’interprétations des versets, parfois des plus audacieuses.
Comment alors comprendre ce principe ? Que cherche-t-il à nous enseigner précisément sur ce qu’est le Pshat, et ce qui peut l’opposer ou non à ce que l’on appelle une “Drasha” ?
Pour mieux l’apréhender, nous travaillerons sur plusieurs de ses occurrences, qui nous permettront notamment de voir qu’il n’est pas hermétique aux exceptions, et que les sages eux-mêmes admettent que, “même en ayant appris tout le Shass" (les 6 traités de la Michna), on peut passer à côté du sens de ce principe fondamental
Une destruction créatrice?
Intervenant: Emmanuel Bonamy
Date: Juin 2025
Les différents « travaux » interdits le jour de shabbat sont pensés sur le modèle de ceux participants à la construction du Sanctuaire. Il s’agit d’un certains nombres d’actions fondamentalement créatrices qui concourent à l’élaboration d’une œuvre, avec un procédé et une finalité définis. À ce titre, n’est punissable comme une transgression du repos shabbatique qu’une action de ce type. Il n’est alors pas étonnant que l’on trouve un principe talmudique énonçant que « tous ceux qui détériorent sont exemptes ». L’affaire semble entendue : détériorer n’est pas créer, détruire n’est pas œuvrer, et seule une action pleinement créatrice porte la dignité de devoir être mise en suspens le jour de shabbat.
Pourtant, toute œuvre humaine étant la transformation matérielle d’un état précédent, un moment destructeur semble consubstantiel à l’acte créateur. Comment penser un tel moment au regard de l’exigence du désœuvrement shabbatique ? Selon quels critères une destruction pourrait être considérée comme créatrice ?
À partir de certains passages du traité Shabbat, nous tâcherons d’élucider ces questions, et de réfléchir à ce que créer signifie, à partir de ce qui n’en est peut-être pas uniquement la négation.
Une fois n’est pas coutume : le minhag, entre fidélité et uniformité
Intervenant: Sophie Bigot-Goldblum
Date: Mai 2025
Quand faut-il se plier aux usages et coutumes de la majorité ? La halakha peut-elle tolérer l’indépendance et la diversité des pratiques ?
Le quatrième chapitre de Massekhet Pessaḥim explore le rôle du minhag (coutume) dans le façonnement de la pratique halakhique. Que faire si, pendant ses vacances de Pessaḥ, on rend visite à une communauté qui s’interdit de faire des melakhot dès la mi-journée la veille de la fête — alors que ce n’est pas notre usage ?
Faut-il défendre la coutume dont on est le dépositaire ? Ou bien faut-il éviter de froisser ceux qui nous accueillent, quitte à renoncer temporairement à notre propre pratique ?
Sauver une vie, sauver la Torah ? Les paradoxes de Pikoua'h nefesh
Intervenant: Rav Jacqui Ackermann
Date: Mai 2025
À première vue, tout semble clair : le principe de Pikoua'h nefesh (פיקוח נפש), selon lequel sauver une vie justifie la transgression de presque toutes les mitsvot, apparaît comme un des piliers éthiques fondamentaux du judaïsme.. Pourtant, en y regardant de plus près, ce principe halakhique ouvre une série de questions déroutantes et souvent inconfortables.
Comment comprendre qu'une Torah divine, précisément donnée pour sanctifier la vie, puisse commander sa propre suspension en cas de danger mortel ? Et s’il est permis de transgresser la Torah pour sauver une vie humaine, est-ce parce que la vie est plus sacrée que la Loi elle-même, ou précisément parce que telle est la volonté profonde du Législateur divin ? Cette tension interne pousse les sages du Talmud à définir précisément quelles mitsvot doivent céder devant la menace d’une mort imminente et lesquelles, de manière surprenante, demeurent intouchables.
Nous aborderons ces questions cruciales en explorant non seulement le texte du Talmud mais aussi les commentaires des grands maîtres médiévaux et modernes (Rishonim et A'haronim). À travers leurs débats, nous nous interrogerons sur des cas limites: quelles sont par exemple les frontières du Pikoua'h nefesh lorsque l'issue est incertaine, improbable, ou lorsque sauver une personne peut mettre d’autres vies en péril ?
Au-delà des évidences, Pikoua'h nefesh interroge profondément ce qu’est l’essence de la Loi divine : une Loi faite pour l’homme ou un homme au service de la Loi ?
Suis-je le gardien de ton bien?
Intervenant: Ivan Segré
Date: Avril 2025
Dans la première michna du chapitre 8 du traité Baba Metsia et la Guemara qui y est relative, il est question des quatre formes de Chemira, de "garde" d'un objet ou d'un animal : le gardien gratuit (שומר חינם), le gardien rémunéré (שומר שכר), le locataire (שוכר) et l’emprunteur (שואל). Pour déduire des versets les lois qui encadrent chacune de ces gardes, la Guemara les interprète.
Mais entre la lecture que les Sages du Talmud proposent d'un verset, et la lecture que nous sommes enclins à en faire, il y a, comme souvent, un décalage, voire un abîme.
Est-ce à dire que les Sages se permettent une liberté d'interprétation qui confine à l'arbitraire, comme la critique universitaire tend à le penser, ou que des traditions de lecture se sont transmises de génération en génération, et que nous les acceptons aujourd'hui au titre d'une Torah orale même si, de fait, nous n'en comprenons pas la logique intrinsèque ?
Ou bien, est-ce précisément l'enjeu de "l'étude" que de retrouver cette logique intrinsèque et d'en éprouver la rigueur et la fécondité ?
Nous partirons des versets, puis nous tâcherons de comprendre la manière dont les sages lisent. Car c'est là que se trouve le din , la loi: non pas tant dans la lettre, ni dans l'esprit, que dans la capacité d'en "garder" l'articulation dialectique.
Introduction à la hassidout Habad
Intervenant: Patrick Belhamou
Date: Mars 2025
Au début du Tanya, Rabbi Shnéor Zalman de Lyadi, le fondateur de la hassidout Habad, rapporte les propos de Rabbi Simlaï dans le traité Nida (30,b) affirmant que juste avant d’être mis au monde, on impose au fœtus de formuler le serment "d’être un juste et de pas être un méchant" etc.
Or, ce passage ne constitue que la fin d’un propos très surprenant rapporté au nom de Rabbi Simlaï. Celui-ci se propose de nous révéler, la plupart du temps en s’appuyant sur des versets, rien de moins que les mystères de la vie intra-utérine. Mais qu’est-ce à dire ? Comment entendre ce passage qui se présente comme une série d’affirmations gratuites et invérifiables ni par les sens ni par la raison ?
C’est ce que nous tenterons d’étudier ensemble avec en ligne de mire le fait que l’homme, avec sa naissance, se constate comme déjà responsable de ce qu’il est et surtout de ce qu’il était avant d’être. En ce sens, pour Rabbi Shéor Zalman, la référence à ce texte au début de son livre peut apparaître comme une exhortation à naître véritablement.
Amalek : la fabrique de l’ennemi
Intervenant: David Lemler
Date: Février 2025
Au sujet d'Amalek, la Torah déclare_Devarim 25, 19_ :"Tu effaceras le souvenir d'Amalek sous le ciel. Ne l'oublie pas"
Se souvenir de devoir effacer le souvenir : telle est l’injonction contradictoire associée à la figure d’Amalek. Dans cette étude, nous nous interrogerons sur la nécessité, qui semble ressortir des sources, de se donner un ennemi irrémissible, qui ressemble étrangement à Israël (nomadisme, persévérance envers et contre tout). Pourquoi la tradition s’emploie-t-elle à fabriquer cet ennemi éternel alors qu’elle disposerait de toute sorte de moyens pour le renvoyer à un passé légendaire ? Loin des simplifications qui voient en Amalek un « méchant », animé par la seule haine antisémite, il est fondamental de penser ce que signifie qu’il surgit lorsqu’Israël s’égare et oublie.
Le respect des parents
Intervenant: David Scetbon
Date: Janvier 2025
Durant des siècles le respect des parents était considérée comme une valeur commune aux sociétés orientales et occidentales. Les bouleversements de la notion même de famille que nous connaissons aujourd'hui ont au moins l'avantage de nous pousser à interroger ces notions à nouveaux frais. Quel est leur contenu ? Quelles en sont les limites ? S'agit-il d'une forme de domination sur les enfants ? Nous tenterons d'approcher ces questions en approfondissant les textes talmudiques et halakhiques afférents.